la réforme de la procédure d'inaptitude : août 2016
C'est la loi du 8 août 2016 qui a réformé la procédure d'inaptitude et qui entre en application le 1er janvier 2017. Ce qu'il faut retenir :
- à l'embauche, sauf pour les emplois à risque, il n'y a plus de recours obligatoire au médecin du travail pour la visite médicale d'inaptitude. Certes, l'employeur doit toujours faire appel aux associations de service et de santé au travail mais le suivi de l'état de santé du salarié sera désormais assuré par des visites d'information et de prévention effectuées pour un porfessionnel de la santé et qui être un médecin du travail mais aussi un collaborateur du médecin, un interne en médecine du travail ou un infirmier.
En revanche, il y a toujours l'obligation des visites du médecin du travail pour les travailleurs handicapés ou percevant une pension d'invalidité, les femmes enceintes allaitantes ou venant d'accoucher, les salariés exposés à des champs électromagnétiques au-delà des valeurs limites d'exposition...les emplois à risque.
Le professionnel de santé délivrera une attestation de suivi aux salariés et employeurs à l'issue de toute visite d'information et de prévention que l'on appelle désormais la VIP.
Pour les salariés à risques, on parle toujours de la VMA c'est-à-dire la visite médicale d'aptitude. Le médecin du travail dans cette hypothèse, délivre toujours un avis d'aptitude ou d'inaptitude.
Concernant la visite initiale d'embauche, s'il n'y a pas de risque, elle n'est plus obligatoire si le salarié a bénéficié d'une VIP dans les 5 ans précédents son embauche auprès d'un autre employeur.
Elle n'est pas non plus obligatoire si le salarié exerce un emploi identique.
Pour la VMA d'embauche, elle n'est pas requise lorsque le salarié a déjà bénéficié d'une VMA dans les 2 ans qui précèdent son embauche.
La visite d'embauche si elle est nécessaire, devra être réalisée dans les 3 mois de la prise effective du poste.
Le délai est ramené à 2 mois s'il s'agit d'apprentis.
En revanche, elle doit être antérieure à la prise de poste pour les salariés qui travaillent de nuit et les jeunes de moins de 18 ans ainsi que pour les salariés exposés aux agents biologiques ou à des champs électromagnétiques.
Après la VIP d'embauche, la périodicité est de 5 ans maximum en principe au lieu de 2 ans et 3 ans pour les travailleurs handicapés ou invalides ou travailleurs de nuit.
Si le salarié a bénéficié d'une visite médicale d'aptitude d'embauche, il doit effectuer des visites selon une périodicité qui ne peut être supérieure à 4 ans.
En conclusion : c'est moins contraignant mais plus compliqué avec risque de ne pas respecter les nouveaux délais !
Le constat d'inaptitude
Nous sommes dans l'hypothèse où le salarié travaille dans une entreprise.
Il est en arrêt maladie durant plus de 30 jours consécutifs lorsque son médecin traitant ne lui prescrit plus d'arrêt maladie.
De fait, l'employeur doit prévoir la visite auprès du médecin du travail pour voir s'il y a aptitude à la reprise ou non.
Auparavant, le médecin délivrait deux avis d'inaptitude avec un intervalle de 15 jour et à compter du 2ème avis d'inaptitude, l'employeur devait, dans le délai de 30 jours, soit proposer un reclassement au salarié, soit mettre en place une procédure de licenciement pour impossibilité de reclassement suite à l'avis d'inaptitude du médecin du travail.
Désormais le principe depuis le 1er janvier 2017 c'est qu'un seul examen constatant l'inaptitude suffit.
Ce n'est que si le médecin du travail l'estime nécessaire qu'un second examen de reprise doit avoir lieu. S'il estime cette seconde visite nécessaire, celle-ci doit avoir lieu dans un délai qui n'excède pas 15 jours après le 1er examen. Il s'agit de 15 jours calendaires. Cela signifie que l'on compte les samedis et dimanches... Il s'agit bien d'un délai maximum. Les obligations qui pèsent sur le médecin du travail sont renforcées.
En effet, le médecin du travail ne peut déclarer un salarié inapte à son poste de travail qu'après avoir réalisé 4 actions à savoir :
- un examen médical accompagné le cas échéant d'examens complémentaires permettant un échange sur les mesures d'aménagement, d'adaptation ou de mutation de poste.
- avoir réalisé une étude de poste. Cela veut dire que le médecin du travail doit se rendre dans l'entreprise. Cette étude peut être réalisée par un membre de l'équipe pluridisciplinaire autre que le médecin du travail.
- avoir réalisé ou faire réaliser une étude des conditions de travail dans l'établissement et avoir indiqué la date à laquelle la fiche d'entreprise a été actualisée.
- avoir échangé, par tout moyen avec l'employeur.
Cet échange doit permettre à l'employeur de faire valoir ses observations sur les avis et propositions que le médecin du travail entend adresser.
Le médecin peut proposer à l'employeur à l'appui d'une équipe pluridisciplinaire ou celui d'un organisme compétent en matière de maintien à l'emploi.
Si à la suite de ces 4 actions, le médecin constate qu'une mesure d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste occupé n'est possible et que l'état de santé du salarié justifie un changement de poste, il pourra alors remettre un avis d'inaptitude au poste.
Cet avis d'inaptitude doit être plus précis.
En effet, il n'était pas rare que les avis soient très succints n'aidant absolument pas l'employeur dans sa démarche de reclassement.
Parfois, les employeurs sollicitaient des précisions au médecin du travail qui ne répondait pas.
Désormais, l'avis d'inaptitude doit comporter des conclusions écrites, assorties d'indications relatives au reclassement du salarié.
De fait, le médecin peut préciser que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'entreprise.
Ces deux mentions permettent à l'employeur de pouvoir procéder au licenciement pour inaptitude sans avoir, à priori, à rechercher un reclassement.
Pour ma part, je resterai prudente, attendant des décisions de la Cour de Cassation Chambre Sociale pour vérifier que c'est bien l'interprétation stricte que l'on peut faire du texte.
Etre prudent signifie que l'employeur devra à tout le moins de préciser dans la lettre de licenciement que le reclassement n'était pas possible et d'en expliquer les raisons.
L'avis d'inaptitude devra préciser les modalités de recours pour être contesté ainsi que le délai de recours qui est de 15 jours.
L'avis d'inaptitude peut être émis lors de la visite ou être notifié plus tard.
Il doit être notifié au plus tard à la date d'expiration du délai de 15 jours à compter du 1er examen médical du salarié.
Il devra y avoir une date certaine dans la notification tant au salarié qu'à l'employeur pour faire courir le délai de recours.
La motivation du licenciement pour inaptitude doit reposer sur l'un des 3 motifs suivants :
- la justification de l'impossibilité de proposer un emploi de reclassement,
- le refus par le salarié de l'emploi proposé ou encore,
- la mention expresse dans l'avis d'inaptitude que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé.
Cette nouvelle formulation permet de licencier le salarié même si l'entreprise fait partie d'un groupe.
En effet, désormais on parle bien de l'emploi.
La mention expresse dans l'avis d'inaptitude du médecin du travail que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.
normalement dans les deux derniers cas de figure, ces mentions doivent suffire à exonérer l'employeur de l'obligation de rechercher un reclassement et de suivre la procédure afférente au reclassement.
De la même façon, il convient d'être prudent tant qu'il n'y a pas de décision de la Cour de Cassation sur l'interprétation qu'elle peut faire de ce nouveau texte.
Il convient de rappelr que si la procédure est désormais la même et de fait s'il y a une procédure renforcée pour une inaptitude liée à la maladie professionnelle, il existe encore quelques spécificités pour la maladie d'origine professionnelle.
Pour la maladie professionnelle ou l'accident du travail : spécificités
Le salarié peut toujours demander une indemnisation temporaire auprès de la CPAM après le constat de son inaptitude et avant qu'il ne soit licencié pour ne pas se trouver sans aucune indemnité sachant que durant cette période, l'employeur n'a toujours pas l'obligation de payer le salarié.
Le salarié a toujours droit aussi à une indemnité de licenciement majorée et au versement de l'indemnité compensatrice de préavis.
Enfin, les sanctions sont toujours plus lourdes puisque les dispositions de l'article L1226-15 octroient au salarié, lorsque le licenciement est considéré sans cause réelle ni sérieuse, une indemnité qui peut être inférieure à 12 mois de salaire.
Cette indemnité se cumule bien évidemment avec l'indemnité spéciale de licenciment et l'indemnité de préavis.